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Pourquoi la gauche doit s’intéresser à la famille

  • Renouvier
  • 20 déc. 2023
  • 3 min de lecture

L’imaginaire collectif de gauche assimile la famille à une valeur de droite. Il est certain que la devise de Vichy a marqué la famille de manière négative. Pourtant, de la même manière que le travail et la patrie sont historiquement des valeurs de gauche que celle-ci doit se les réapproprier, la famille doit redevenir un enjeu de réflexion et de proposition pour ceux qui veulent que la liberté, l’égalité et la fraternité adviennent réellement dans le pays.


La difficulté de cette démarche tient à deux écueils.


D’une part, la conception américaine de la société exclut toute immixtion du politique dans la sphère familiale. Il est vrai qu’une volonté politique de régir entièrement cette sphère relèverait d’un projet totalitaire. Pourtant, depuis les sociétés antiques jusqu’au projet éducatif républicain français, la famille a fait l’objet de réflexions qui, bien que relevant d’un projet politique, n’en sont pas pour autant totalitaires.


D’autre part, la bourgeoisie intellectuelle, qui constitue l’essentiel du vote de gauche dans les grandes villes, tend à considérer la famille comme une entrave à l’émancipation individuelle et comme le vecteur de traditions dont l’individu émancipé doit d’affranchir. Compte tenu du poids de cette classe sociale dans l’imaginaire de gauche, sa vision de la famille constitue une entrave à la réflexion. Pourtant, quand 90% des Français affirment considérer la famille comme une valeur et comme le premier lieu de la solidarité, il y a lieu de s’affranchir de ces préjugés pour examiner de manière cartésienne ce que représente la famille dans la société contemporaine.  


Une fois ces deux écueils franchis, que dire de la famille ?


Qu’elle est d’abord l’un des derniers lieux, dans notre pays, où un pouvoir absolu et sans limite peut s’exercer sur des êtres humains – des parents sur les enfants, des hommes sur les femmes. Pour ceux qui défendent la liberté et protègent les plus faibles, il y a un enjeu politique à ce que ces valeurs soient respectées dans l’espace familial, par la protection de l’enfance, la protection des femmes battues ; et que les moyens de l’Etat soient mobilisés pour cela.

Que la famille est le premier lieu de solidarité et que son absence a des conséquences diamétralement opposées selon que l’on soit riche ou pauvre. L’argent donne la possibilité (ou plutôt l’illusion) de pouvoir mener sa vie sans le soutien des autres, y compris sans le soutien de sa famille. Se passer d’une famille est alors possible, voire même souhaité pour se libérer des contraintes qu’elle suscite. En revanche, les familles pauvres sont rapidement au bord du gouffre dès qu’un parent quitte le foyer : les familles monoparentales sont les plus sujettes à la pauvreté et leurs enfants ont plus de risque d’échouer à l’école et de tomber dans la délinquance. Pour ceux qui veulent une égalité réelle dans le pays, il y a là un enjeu contemporain essentiel, qui justifie un intérêt de la société pour les familles monoparentales, pour les aider à maintenir un cadre propice à une vie tournée vers l’avenir – par les institutions de la petite enfance, l’école, l’éducation populaire et des versements pécuniaires.


Qu’enfin, les valeurs transmises au sein d’une famille doivent être au moins cohérentes, sinon identiques, avec les valeurs du projet républicain car ce projet n’est pas seulement institutionnel ou financier : c’est un projet qui ne peut perdurer qu’à la condition que les mœurs des citoyens soient des mœurs démocratiques, c’est-à-dire à la condition que les citoyens aient la volonté de se conduire comme tels, avec la vision du monde, la structure de pensée et de valeurs et l’engagement moral que demande une démocratie réellement vivante. L’école et l’éducation populaire doivent être les principaux vecteurs de ces valeurs. Sans aller jusqu’à la vie collective des enfants dans les kibboutz, tout ce qui renforce la vie collective des enfants dans un cadre qui leur transmette les valeurs de liberté, d’égalité et de fraternité est bon à prendre. Le débat entre école privée et école publique doit se comprendre à l’aune de ce projet. Quand l’école publique recule, c’est la pérennité même du projet républicain qui est en cause.


Le projet républicain passe par la famille et a besoin de familles solidaires, solides et conscientes de leurs responsabilités : comment la gauche pourrait-elle s’en désintéresser ?

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